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A la rencontre de Nicolas Cougot, rédacteur en chef de Lucarne Opposée

Après Les Cahiers du foot, Supersub, Les Sportives, Caviar, nous continuons notre périple à la rencontre des créateurs de revues et magazines. Cette fois, nous faisons escale avec Lucarne opposée à l’occasion de la sortie de leur 13e numéro. Rencontre avec Nicolas Cougot, le rédacteur en chef.


Pouvez-vous vous présenter ?

Je suis Nicolas Cougot, rédacteur en chef de Lucarne Opposée, média que j’ai créé en 2008. Mon parcours est plutôt atypique puisque je n’ai aucune formation de journaliste, je ne sors pas d’école de journalisme. J’ai une formation scientifique, j’ai une thèse de biologie moléculaire et j’ai été chercheur post-doctorant au CNRS pendant près de dix ans. En 2015, j’ai changé de voie pour me consacrer au journalisme de sport.



Pourquoi avez-vous décidé de créer un magazine ?

On écrit de nombreux articles « Culture foot » sur le site dans lesquels on raconte toutes sortes d’histoires autour de ce sport dans « nos » pays. On s’est rendu compte que si internet garde une trace de tout, il oublie vite. Nos écrits s’envolaient donc – même nous parfois on finit par oublier qu’on a déjà écrit sur un sujet particulier. On s’est alors dit que ce serait bien de poser nos histoires sur papier, ne serait-ce que pour avoir un objet physique. Au départ, on s’était dit qu’on publierait des articles du site dans une sorte de « best-of » annuel, puis, comme on n’est pas du genre à être totalement sains d’esprit, on a finalement opté pour publier des histoires originales, qu’on ne retrouverait que dans le magazine (qui est d’ailleurs plus une revue qu’un magazine à proprement parler).


D’où vient le nom Lucarne opposée ?

Rien de bien original. Quand j’ai décidé de me lancer, je souhaitais m’intéresser aux footballs non couverts par les grands médias, être donc à l’opposé des tendances. Il m’a suffi ensuite de lui accoler lucarne, que les amateurs de foot connaissent bien. Cela permettait aussi de donner au site un nom à double sens : l’angle du but qui ramène le média à sa thématique, le football, la lucarne comme fenêtre qui ouvre sur d’autres horizons. Ce qui colle à notre ADN.


Qu’est-ce que l’ADN de Lucarne opposée ? Est-ce tout sauf l’Europe ?

Oui, c’est tout sauf l’Europe. Non par « europophobie » - on suit tous divers championnats/compétitions d’Europe – mais par volonté de raconter d’autres footballs, souvent au mieux ignorés, au pire méprisés. Mais finalement, notre ADN ne se résume pas à la zone couverte plutôt à la façon de le faire. Je dis toujours que l’objectif de LO est de susciter la curiosité, l’envie aux amoureux de foot de venir découvrir d’autres mondes. Pour cela, on active deux leviers :

- le suivi des compétitions actuelles, afin le lecteur/auditeur sache ce qu’il se passe en ce moment.

- ce qu’on appelle « Culture foot », ces histoires que l’on raconte, afin que le lecteur/auditeur comprenne pourquoi et comment ces footballs en sont arrivés à ce qu’ils sont aujourd’hui, afin qu’ils aient les clés pour mieux comprendre la/les spécificité(s) de ces autres footballs.

C’est, je pense, ce qui a fait notre originalité aussi depuis le départ de cette aventure. Et c’est ce que l’on continue de faire, à travers les podcasts, qui s’affranchissent souvent de l’actualité, à travers les magazines et avec notre maison d’édition.


On voit qu’actuellement plusieurs magazines se sont créés ou recréés. Les cahiers du foot, Caviar, vous, et prochainement l’After foot. Comment expliquez-vous cela ?

On entend souvent que la France n’est pas un pays de foot. Je pense justement le contraire et cette offre qui se multiplie, le démontre. Il y a des consommateurs de football, au sens premier du terme, c’est-à-dire des gens qui se nourrissent de football et ce, sur différents supports. Regarde la pluralité des offres média : les abonnements numériques, les formats papiers qui naissent et/ou se développent, les podcasts… Pendant ce temps, France Football a beau traverser une crise, il reste une institution que l’on lit, So Foot fonctionne parfaitement sur son marché. À côté de ces deux géants, les indépendants – les lecteurs de ceux-ci donc – se sont professionnalisés (on en est aussi modestement la preuve), n’ont plus peur de se lancer. Pourquoi ? D’une part, car maintenant, c’est possible d’un point de vue logistique et surtout parce qu’au final, tu sais que tu vas trouver un public si ton langage est clair. Quand on a lancé le magazine il y a maintenant plus de trois ans, on n’avait pas de vision économique, on n’a jamais posé un business-plan ou autre chose de ce type. Mais on savait qu’on toucherait des amoureux de foot. Parce qu’on savait qu’il y a de la place pour de la culture foot en France. Après tout, la rédac de LO est aussi composée de consommateurs, on achète, écoute, lit. On se nourrit tout autant de foot que notre public. C’était une raison suffisante pour franchir le pas. Et je pense que nombreux indépendants se disent la même chose quand ils se lancent et le fait de voir que c’est possible brise ces barrières mentales que certains peuvent avoir. Je pense aussi que ce sont ces indépendants, par l’émulation qu’ils ont créée, qui ont contribué à faire bouger les lignes, à mettre en évidence justement qu’il y a une culture foot en France. Et ainsi, même de grands médias se lancent ou se relancent dans ces voies un temps oubliées.



L’histoire du Shadhin Bangla Football Dal au Bangladesh, le Mushuc Runa en Equateur, la CONIFA, le foot à Hong Kong, l’équipe Pérou-Chili… Dans ce n°13, vous proposez des histoires peu connues des passionnés de football. Comment travaillez-vous pour dénicher ces pépites ?

On se nourrit de nos footballs, de leurs histoires. Je l’ai dit, notre objectif est de susciter la curiosité, cela signifie donc que nous, à la base, nous sommes de grands curieux. On est profondément ancrés, attachés à nos footballs, pas uniquement sur l’angle de ce qu’il s’y passe de nos jours, mais aussi et surtout sur leur histoire. La majorité des rédacteurs de LO a en commun ce goût de l’histoire de nos footballs. Je vais parler de mon cas, je passe mon temps à lire des archives de journaux chiliens ou argentins des années 40 à nos jours. Marcelin Chamoin, féru d’histoire de football brésilien qui a écrit la biographie de Garrincha, lit des tonnes de livres sur ce football. C’est un trait commun des rédacteurs de LO : on lit, on parcourt des archives, on discute avec des gens qui ont des histoires avec ces footballs. Et finalement, les pépites arrivent toutes seules.



Depuis quelques mois, vous avez lancé votre maison d’édition avec un premier livre sur "Garrincha", puis prochainement la traduction de « "Les 11 chemins vers le but" de Bielsa. Pourquoi cette nouvelle étape ? Quel(s) type(s) de livres aurons-nous le plaisir de lire ?

C’est le prolongement logique en fait. Quand tu aimes raconter des histoires aux gens, après le site, les podcasts, les reportages et le magazine, il vient un moment où arrive l’envie de te poser pour aller plus loin en écrivant un livre. C’est notre cas. Pourquoi nous lancer nous et pas démarcher des éditeurs me diras-tu ? Premièrement car on est quelques-uns à avoir déjà une belle collection de refus de certains éditeurs (quand on a des réponses), deuxièmement car on s’est rapidement dit que finalement, on pouvait le faire. Et on l’a fait ! Maintenant que la structure existe, tout est permis. On a débuté par une biographie, on poursuit avec une traduction dont nous avons acheté les droits, on a déjà d’autres projets qui vont arriver, certains plus pointus que d’autres, sur des sujets aussi divers que variés, mais tous en relation avec « nos » footballs. On va pouvoir aborder toutes les histoires qui nous passionnent, qu’elles concernent des joueurs, des époques, des équipes, des peuples, des cultures. On ne se fixe aucune limite concernant la ligne éditoriale, on n’est pas non plus fixés sur format de livre (roman, essai, BD…). Et on sait que les gens nous suivront dans nos folies. Ils l’ont déjà démontré jusqu’ici et c’est certainement notre principal moteur.


Propos recueillis par Julien Legalle

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