La « locomotive tchèque »

Il est toujours difficile de s’attaquer à une légende du sport car on peut vite décevoir les lecteurs en oubliant des faits marquants ou en rabâchant des scènes vues et revues. S’attaquer à Emil Zatopek, l’un des plus grands athlètes du XXeme siècle, grand rival et ami d’Alain Mimoun, était donc périlleux.

Rassurez-vous, ce biopic est une réussite à plusieurs niveaux. Toutes les facettes de la « locomotive tchèque », ses sacrifices, son engagement sportif et social, sont mises en avant par le scénario et le dessin très graphique et singulier de Jaromir 99. Le lecteur est plongé dans l’atmosphère de répression, de peur et de terreur qui a caractérisé le début de la guerre froide en Tchécoslovaquie et dans les pays communistes.

Les auteurs réussissent à évoquer le triplé historique de l’athlète tchécoslovaque en 1952 aux jeux olympiques d’Helsinki, tout en abordant des épisodes moins connus comme son dur apprentissage chez Bata ou son opposition au régime communiste. En effet, lors des JO finlandais, il remporte un autre succès en contraignant le gouvernement à autoriser la participation de son collègue Stanislav Jungwirth, initialement sanctionné pour des motifs politiques. Cet album met également en lumière son histoire d’amour avec l’athlète Dana Ingrova qui remportera l’or au javelot. Ainsi plusieurs scènes montrent le soutien mutuel entre les deux athlètes pour arriver à la victoire. Cette bande dessinée ne serait pas une totale réussite sans ses traits graphiques, d’ailleurs, on imagine aisément certaines planches en affiche.

Avec les publications de l’autobiographie de Nadia Comaneci, du livre de Vincent Duluc sur Kornelia Ender, et cet album, les athlètes qui ont grandi sous le régime communiste semblent toujours intriguer les auteurs et passionner les lecteurs. L’opacité de ce régime fait toujours fantasmer et travailler l’imagination des européens.

Jan Novàk, Jaromir 99. Zatopek. Des ronds dans l’O, 2018, 204 pages

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