La passion en images

Après un mois de compétition où la télévision, il faut l’avouer, a largement pris le pas sur les livres, nous avions pris la bonne résolution d’attaquer la pile d’ouvrages qui trônait au sommet de notre table de chevet, devenue en l’espace de quelques matchs un véritable banc de touche. Mais, il faut l’avouer une seconde fois, nous avions posé pied à terre face à cette montagne de papier alors que les coureurs de la Grande Boucle s’élançaient dans les premiers lacets pyrénéens. Et même si les promesses de cette édition n’étaient jamais totalement respectés, la faute à la pluie, à la chaleur, à la fatigue, au refus des organisateurs de laisser le maillot jaune perdre pied dans le Ventoux ou encore aux calculs technologiques de son équipe, nous n’étions finalement pas plus attaquant que Richie Porte ou Nairo Quintana ou, à l’inverse (et n’ayons pas peur de filer la métaphore jusqu’à son terme), moins combattif que Pantano, Sagan ou Alaphilippe. Il nous a donc fallu attendre les Champs-Elysées, jouir de quelques jours de récupération, constater l’habituelle morosité de la période du mercato et ne pas s’indigner d’un village olympique encore en chantier pour revenir à des considérations lettrées.

Un livre était à la sortie des vestiaires depuis le début de l’Euro déjà : Le Collectif, septième bande-dessinée de la collection « Alimentation générale ». Pour l’occasion, pas moins de 25 auteurs ont apporté leur contribution, chacun avec son style, son rôle, son approche, sa vision de jeu, mais à chaque fois avec un dénominateur commun : la passion du sport et de son univers. Dans son ensemble, l’ouvrage porte un regard à la fois décalé et précis, et parvient à faire dialoguer l’innocence d’un jeu vu par les yeux d’un enfant avec une forme de raison artistique. Dans ce savoureux opus, magnifique fatras de passements de jambes et d’arabesques en tous genres, se côtoient les blagues potaches B-Gnet, Bouzard, François Ravard, Joseph Safieddine et James Kayes, les récits historiques de Jérôme Bihan, Mathieu Demore ou Jean-Michel et Robin Raffalli, les analyses plus piquantes de Benjamin Adam ou Wassim Bentaleb, la science-fiction de Gwenole Le Dors, le « délire » littéraire de Guillaume Carreau ou encore les histoires plus intimistes de Thierry Bedouet, Abdel de Bruxelles ou de Thomas Gochi. En somme, il y en a pour tous les goûts, et ce sans renier la cohérence générale du recueil. C’est donc le bon moment, pour ceux qui peinent à dévisser leur nez des événements sportifs du début de l’été, de rattraper un peu leur retard… avant, peut-être, d’être totalement pris par les olympiades brésiliennes.

Le Collectif, « Alimentation générale », n°7, Nantes, Vide Cocagne, 2016, 122 p. Enregistrer